Il y a un an, déjà, j’usais mes nouvelles tennis, achetées pour l’occasion, sur le bitume parisien, demandant à corps et à cris, avec un million d’autres personnes, que les enfants puissent toujours avoir un père et une mère. Et je peux dire aujourd’hui, comme un grognard de la Grande armée : « j’y étais ».
De toute ma vie, je n’avais jamais vu ça. Des drapeaux bleus et roses à perte de vue, jusqu’à la tombée de la nuit. Des enfants jusqu’aux grands-parents, osant brader le froid pour défendre une certaine conception de l’humanité. A la fin, le ciel en était ému : il pleuvait. Pour la première fois, les aigles levaient la tête… Frigide Barjot avait su percer le mur médiatique comme personne d’autre n’y était arrivé jusqu’ici, invitant tout azimut les masses à défiler ce 13 janvier. Et l’appel avait été étendu dans les campagnes, on avait sonné le tocsin jusque dans les petits villages !
De plus, les meilleurs organisateurs, dignes d’un débarquement, avaient su rendre la mobilisation possible. Les bons réseaux avaient fonctionné à plein régime, c’était le début d’une longue bataille et l’union fit la force.
De mon côté, pauvrement, lors d’un pèlerinage marial en Bosnie-Herzégovine, j’avais rencontré une mère de famille, Nathalie, dont un frère était homosexuel. Sans nous être concertés, nous portions la même idée : aider les personnes homosexuelles à s’exprimer sur ce projet de loi, en leur donnant la parole. (Il n’est pas exagéré de dire avoir « vu » la main de la Sainte Vierge dans notre rencontre !). On en causa, à table. Trois jours après, nous montions le collectif Homovox et de nombreuses personnes homosexuelles nous contactaient aussitôt pour témoigner. Qui aurait alors su que cela mènerait le collectif jusqu’à devant M. Hollande ?
Ce 13 janvier 2013, avec ma femme, nous en avions profité pour retourner au lieu exact de notre première rencontre, sur un coin de pelouse du Champ-de-Mars, à quelques mètres du Mur de la Paix. Quatre ans plus tôt nous y récitions ensemble le chapelet avec un petit groupe de prière, lui aussi marial…
Après quoi, je m’incrustais – non sans difficulté – dans le bunker autour du podium pour dire bonjour à nos nouveaux amis homosexuels et palper l’atmosphère. Dans cette enceinte ultra-sécurisée, je sentis immédiatement une grande tension : comme s’il se déroulait sous nos yeux un moment profondément historique dans l’histoire de notre pays. Oui, un combat à l’issue certainement positive, se jouait, au-delà des apparences, des discours et de la foule immense qui se pressait là, devant ce chapiteau unique, transie de froid, les pieds poudreux dans la boue du Champ-de-Mars napoléonien (*).
Cela me rappelait encore, comme en écho, par cette tension vive, un instant de guerre civile que j’avais vécu à Moscou, alors adolescent, avec les tirs de canon de Boris Eltsine contre les derniers soubresauts du communisme… Et ce 13 janvier, chaque mot, chaque intervenant, n’étaient-ils pas comme un boulet rougi par le feu envoyé sur l’Elysée et son idéologie du genre ?
En tout cas, ce soir là, la France libre s’était bel et bien réveillée : mémorable 13 janvier 2013 !